Après une année 2020 en demi-teinte à cause de la crise sanitaire, la filière ameublement misait beaucoup sur l’exercice 2021. L’annonce des résultats, en mars dernier, a confirmé – voire dépassé – les espoirs, avec des ventes en forte hausse pour un chiffre d’affaires et un niveau du marché encore jamais atteints. Analyse.

Décidément, ces deux dernières années auront réservé leur lot de surprises et d’émotions pour la filière ameublement. 2020 et 2021 auront vu se succéder l’appréhension du début de la crise sanitaire, l’espoir dû à « l’effet confinement», le soulagement après l’annonce de chiffres nettement moins désastreux qu’attendu, le retour des doutes avec les rebonds épidémiques et les nouvelles fermetures, et finalement la surprise de résultats florissants pour 2021: par rapport à 2020, la vente de meubles a enregistré une croissance de 14,3%, pour atteindre une valeur de 14,55 milliards d’euros. C’est tout simplement la première fois que ce marché franchit la barre symbolique des 14 milliards. Alors, effet de rattrapage après une année 2020 en retrait? Oui, mais pas seulement. Car si la hausse par rapport à 2020 est à relativiser compte tenu du contexte, la comparaison avec 2019, dernière année de référence pré-Covid, est tout de même parlante: + 8,8%, soit environ 1,2 milliard d’euros de plus. «Plus qu’une année de rattrapage, c’est un véritable engouement que nous avons observé en 2021», affirme fièrement Patrick Prigent, président de la Fédération française du négoce de l’ameublement et de l’équipement (Fnaem). Ces chiffres ont été rendus publics le 15 mars dernier lors de la conférence de presse annuelle organisée par les principaux acteurs de la filière ameublement (Fnaem et Ameublement français) autour de l’étude de l’Institut de prospective et d’études de l’ameublement (Ipea). Ce dernier a pour mission d’améliorer la connaissance de l’évolution de la filière et ses perspectives par le biais d’études statistiques, quantitatives et prospectives du marché.

Les spécialistes en profitent

« La volonté de montée en gamme des ménages, observée depuis 2020 et les différents confinements, s’est poursuivie sur 2021, analyse Patrick Prigent. Les consommateurs sont prêts à investir davantage dans leur mobilier, d’autant plus que les sommes épargnées depuis le début du premier confinement sont colossales. » De fait, depuis le second semestre 2020, ce sont les spécialistes qui profitent de cette tendance. L’évolution de leur chiffre d’affaires est éloquente : + 24,6% par rapport à 2020 et + 22,2% par rapport à l’année de référence 2019, pour atteindre 3,88 milliards d’euros, soit 26,7% du marché des distributeurs. Si tous les spécialistes, quel que soit leur domaine, affichent des progressions intéressantes, ce sont les enseignes de cuisine et de salon qui obtiennent les meilleurs résultats. Une position de leader habituelle pour les cuisinistes, mais plus étonnante pour les spécialistes du salon, qui s’explique elle aussi par cet effet confinement et ce besoin de confort intérieur. L’ameublement milieu et haut de gamme (de type Roche-Bobois, Ligne Roset, Monsieur Meuble…) n’est pas en reste, et affiche la deuxième plus importante progression chez les distributeurs après les spécialistes, avec une évolution de 18,9% par rapport à 2020 (+ 12,1% par rapport à 2019), pour une part de marché évaluée à 1,63 milliard d’euros. Une illustration supplémentaire de l’attrait des produits plus qualitatifs sur les ménages – sans que cela freine les solutions plus abordables : les grandes surfaces de bricolage (GSB) présentent une croissance de 14,1% par rapport à 2020 et de 17,3% par rapport à 2019, capitalisant sur leur capacité à proposer une offre globale pour le réaménagement, notamment en salle de bains, cuisine, meuble meublant et, évidemment, salon de jardin.

«La volonté de montée en gamme des ménages, observée depuis 2020 et les différents confinements, s’est poursuivie sur 2021.»

Concurrence en ligne

Petite déception en revanche pour les grandes surfaces d’ameublement comme But, Ikea et consorts, ainsi que pour les pure players. Leurs résultats respectifs sont finalement assez interdépendants, au moins sur un point : la vente en ligne. En plein boom ces dernières années avec des croissances régulières à deux chiffres, les pure players marquent un peu le pas en 2021, avec une évolution de « seulement » 7,1% par rapport à 2020 (+ 13,5% par rapport à 2019). « Seulement » car, de tous les canaux de distribution, ils sont les derniers en termes d’évolution sur un an. Et si le milliard d’euros de chiffre d’affaires déjà dépassé l’année dernière est confirmé (1,1 milliard sur 2021, soit 7,6% des parts de marché), la progression se fait à un rythme bien inférieur à celle des enseignes de vente physique. Principale raison : la concurrence directe des sites de vente en ligne et marketplaces de ces dernières. Alors que les pure players s’étaient retrouvés sans concurrence ou presque lors des premiers confinements, les enseignes de meubles ont cette fois eu le temps de peaufiner leur offre alternative sur Internet, et ainsi de grignoter une partie des parts de marché récemment acquises par ceux-ci… Malgré cette éclaircie, la grande distribution a subi quelques nouvelles tempêtes qui impactent forcément ses chiffres: difficultés d’approvisionnement, problèmes de stocks, délais de livraison allongés, et surtout fermeture administrative en début d’année des surfaces de vente de plus de 10000 m2, ne laissant à cette branche du circuit…

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