{"id":1938,"date":"2021-10-13T16:00:17","date_gmt":"2021-10-13T14:00:17","guid":{"rendered":"https:\/\/l-agenceur.com\/?p=1938"},"modified":"2021-10-13T17:31:29","modified_gmt":"2021-10-13T15:31:29","slug":"entretien-avec-sanjit-manku","status":"publish","type":"post","link":"https:\/\/l-agenceur.com\/2021\/10\/13\/entretien-avec-sanjit-manku\/","title":{"rendered":"Entretien avec… Sanjit Manku"},"content":{"rendered":"

[vc_row][vc_column][vc_column_text]Patrick Jouin et Sanjit Manku, tandem singulier formant l\u2019agence Jouin Manku depuis 2006, ne cessent d\u2019imaginer l\u2019avenir en r\u00e9inventant le pass\u00e9. \u00c0 l\u2019\u00e9coute de tous les temps et de toutes les cultures, ils font r\u00e9sonner de sens les espaces et leurs composants, conf\u00e9rant une grande justesse \u00e0 chacun de leurs projets sur mesure. La vision de ce duo en vogue est particuli\u00e8rement pris\u00e9e, et ses comp\u00e9tences sont d\u00e9sormais sollicit\u00e9es partout de par le monde, des h\u00f4tels renomm\u00e9s de Paris et de Strasbourg aux restaurants \u00e9toil\u00e9s \u00e0 Bangkok ou Singapour, du prochain salon VIP de l\u2019a\u00e9roport Charles-de-Gaulle \u00e0 la prestigieuse Mamounia de Marrakech. Dans le long entretien qu\u2019il nous a accord\u00e9, Sanjit Manku d\u00e9voile, entre autres, leur m\u00e9thodologie de travail. D\u00e9couverte.<\/em><\/strong><\/p>\n

Par Kaoru Urata<\/strong><\/em><\/p>\n

On doit notamment \u00e0 Sanjit Manku, associ\u00e9 \u00e0 Patrick Jouin,plusieurs restaurants d\u2019Alain Ducasse ou les boutiques de bijoux Van Cleef & Arpels tout autour du globe, les bureaux du minist\u00e8re de la D\u00e9fense, un projet sur la gare Montparnasse, ou encore des h\u00f4tels de luxe tels que le Plaza Ath\u00e9n\u00e9e, la Mamounia de Marrakech ou l\u2019extension des Haras de Strasbourg\u2026 Sanjit Manku n\u2019est peut-\u00eatre pas l\u2019associ\u00e9 designer le plus m\u00e9diatique du duo, mais cela ne l\u2019emp\u00eache pas de partager la m\u00eame vision que Patrick Jouin. N\u00e9 au Kenya, dipl\u00f4m\u00e9 au Canada et luthier de formation, il revient pour nous sur leur fa\u00e7on de cr\u00e9er un projet.<\/p>\n

Au-del\u00e0 de la mati\u00e8re et des teintes, nous touchons [\u2026] \u00e0 la spiritualit\u00e9 et \u00e0 l\u2019histoire des savoir-faire.<\/p><\/blockquote>\n

Quel sens accordez-vous \u00e0 l\u2019am\u00e9nagement d\u2019int\u00e9rieur ?<\/strong><\/p>\n

Paradoxalement, l\u2019am\u00e9nagement d\u2019int\u00e9rieur commence par l\u2019ext\u00e9rieur. Car un b\u00e2timent est au d\u00e9part li\u00e9 \u00e0 l\u2019environnement urbain ou paysager dans lequel il se trouve et que l\u2019on s\u2019appr\u00eate \u00e0 quitter. Lors du passage de l\u2019ext\u00e9rieur \u00e0 l\u2019int\u00e9rieur, une conversion s\u2019op\u00e8re entre nos r\u00eaves et les n\u00e9cessit\u00e9s du projet. Je m\u2019explique: si les aspirations et les besoins s\u2019enlacent harmonieusement, je pense qu\u2019on est alors en pr\u00e9sence d\u2019une conception int\u00e9rieure qui trouve son sens et sa justesse. Ce qui \u00e9tait escompt\u00e9 visuellement ou tactilement devient alors l\u2019image physique du lieu. Bien au-del\u00e0 des mati\u00e8res et des teintes, nous touchons \u00e0 la philosophie, \u00e0 la spiritualit\u00e9, aux arcanes de la perception, mais aussi \u00e0 l\u2019histoire des savoir-faire techniques de nos collaborateurs, fabricants, agenceurs, dont certains sont d\u00e9positaires depuis des g\u00e9n\u00e9rations. Si l\u2019on veut concevoir pour notre g\u00e9n\u00e9ration et celles \u00e0 venir, il faut abandonner toute nostalgie li\u00e9e \u00e0 ces valeurs et extraire leur \u00e9lixir pour ajuster le projet. Lors des diff\u00e9rentes phases d\u2019\u00e9laboration d\u2019un am\u00e9nagement int\u00e9rieur, les r\u00eaves et les aspirations de chacun se m\u00ealent, les n\u00f4tres, ceux du client, etc. C\u2019est une vraie aventure au c\u0153ur de laquelle la question du sens, comme vous me la posez, est constamment r\u00e9fl\u00e9chie et r\u00e9invent\u00e9e! Les projets sont d\u00e9di\u00e9s aux clients, mais le processus nous appartient aussi bien qu\u2019aux agenceurs. La qualit\u00e9 du projet s\u2019appuie sur cette confiance, qui vient la nourrir intens\u00e9ment.<\/p>\n

En admettant qu\u2019il n\u2019existe pas de sc\u00e9nario type, quelles sont vos m\u00e9thodologies pour parvenir \u00e0 ce niveau d\u2019exigence ?<\/strong><\/p>\n

Le fil rouge m\u00e9thodologique de nos projets est, premi\u00e8rement, cette association efficace de notre esprit et de notre volont\u00e9. Apr\u00e8s cela, il faut expliquer que les mani\u00e8res de faire changent \u00e0 chaque projet. Alors, pour que le sc\u00e9nario fonctionne, nous avons une vision de l\u2019organisation qui s\u2019explique un peu comme la pr\u00e9paration d\u2019un mets: nous essayons de composer une \u00e9quipe de projet qui serait \u00e0 80% gracieuse, \u00e0 10% normale et \u00e0 10% \u00e9tonnante! C\u2019est important, car tout l\u2019enjeu est dans la mani\u00e8re de faire. Souvent, nous expliquons aux clients que tous les projets qui appliquent cette recette seront sp\u00e9ciaux et permettront que les r\u00eaves deviennent r\u00e9alit\u00e9. Lorsque l\u2019on veut d\u00e9passer le degr\u00e9 de la normalit\u00e9, il importe que les acteurs d\u2019un projet soient dans une m\u00eame bulle philosophique et \u00e9nerg\u00e9tique o\u00f9 ils vont pouvoir influencer les choses par leur personnalit\u00e9. Nous savons par exp\u00e9rience que de cette dynamique et de cette r\u00e9flexion naissent des projets aux caract\u00e8res diff\u00e9rents, que les clients comprennent et adoptent. Aujourd\u2019hui, nous vivons et \u00e9voluons dans un environnement de plus en plus technique et num\u00e9rique, nous sommes loin de l\u2019\u00e9poque o\u00f9 l\u2019on construisait une cath\u00e9drale durant des si\u00e8cles, et pourtant le travail qualitatif doit conserver un sens humain, et ce en pensant \u00e0 la g\u00e9n\u00e9ration suivante, sans se faire pi\u00e9ger par la nostalgie. Le d\u00e9lai et le budget ne sont que des facteurs de contraintes.<\/p>\n

Vous travaillez dans des continents diff\u00e9rents, aux cultures diff\u00e9rentes. O\u00f9 puisez-vous votre inspiration?<\/strong><\/p>\n

La signature de notre agence, c\u2019est de r\u00e9pondre avec le plus de justesse possible \u00e0 chaque projet. Pour cela, nous nous nourrissons du contexte, des r\u00eaves des clients et des sp\u00e9cificit\u00e9s culturelles du lieu. Dans ce contexte, le sur-mesure est de rigueur car ce trio n\u2019est jamais le m\u00eame d\u2019un projet \u00e0 un autre. Nous sommes toujours extr\u00eamement attentifs et curieux des techniques, de la fa\u00e7on dont sont travaill\u00e9s le m\u00e9tal, la fa\u00efence, le bois, le verre, etc. Chaque pays, r\u00e9gion, ethnie, communaut\u00e9 a son propre rapport aux mati\u00e8res. Si les pierres, le verre, le coton, la soie sont des mati\u00e8res nobles, que nous appr\u00e9cions \u00e9norm\u00e9ment, elles peuvent se faire damer le pion lors de notre rencontre avec un maestro du pays qui travaille une mati\u00e8re ordinaire, comme le pl\u00e2tre, et va inventer dans le cadre du projet ce qui n\u2019avait jamais \u00e9t\u00e9 r\u00e9alis\u00e9 avec. Le sublime na\u00eet l\u00e0 aussi, ce sublime dont le projet a besoin. Les clients veulent souvent conna\u00eetre tr\u00e8s en amont la proportion de fabricants locaux impliqu\u00e9e dans le projet, information que nous n\u2019avons pas forc\u00e9ment d\u00e8s le tout d\u00e9but. En revanche, nous avons l\u2019expertise pour g\u00e9rer cette situation, car la recherche des bons fabricants est v\u00e9ritablement un de nos savoir-faire. Toute l\u2019aventure sp\u00e9cifique commence par l\u00e0. Nous cherchons les fabricants qui partagent la m\u00eame sensibilit\u00e9 dans le processus. Souvent, nous correspondons avec des artisans ou des ma\u00eetres d\u2019art sans pour autant pouvoir les rencontrer, mais \u00e0 force d\u2019avoir des \u00e9changes intenses et de r\u00e9aliser des projets ensemble, nous tissons une v\u00e9ritable relation. En moyenne, lorsque les projets se situent \u00e0 l\u2019\u00e9tranger, entre 70 et 80% sont r\u00e9alis\u00e9s localement par des personnes que nous ne connaissons pas de visu. Les 20 \u00e0 30% restants correspondent \u00e0 des r\u00e9alisations confi\u00e9es \u00e0 d\u2019autres artisans d\u2019exception, qu\u2019ils soient de Los Angeles ou de Bangkok par exemple.<\/p>\n

Lorsque l\u2019on veut d\u00e9passer le degr\u00e9 de la normalit\u00e9, il importe que les acteurs d\u2019un projet soient dans une m\u00eame bulle philosophique et \u00e9nerg\u00e9tique o\u00f9 ils vont pouvoir influencer les choses par leur personnalit\u00e9.<\/p><\/blockquote>\n

Comment orchestrez-vous les ma\u00eetres d\u2019\u0153uvre, les <\/strong>ma\u00eetres d\u2019ouvrage et les fabricants pour atteindre <\/strong>l\u2019objectif commun<\/strong><\/p>\n

Nous sommes les interpr\u00e8tes du projet car nous le concevons et nous le dessinons, mais nous ne le fabriquons pas. Nous demandons \u00e0 des tiers de le fabriquer. Pour revenir \u00e0 la m\u00e9taphore culinaire, c\u2019est \u00e0 nouveau une affaire de recette. Tout est influenc\u00e9 par les occupants de cette bulle, les ma\u00eetres d\u2019\u0153uvre, les ma\u00eetres d\u2019ouvrage, les fabricants, et nous concoctons une recette dont le r\u00e9sultat ne sera jamais identique. Patrick [Jouin, ndlr] est fils d\u2019artisan, petit-fils d\u2019\u00e9b\u00e9niste, et sait analyser la fabrication des choses. Pour ma part, j\u2019ai re\u00e7u une formation de luthier et je continue \u00e0 fabriquer des instruments chez moi. Je pr\u00e9cise cela pour mettre en exergue notre rapport mature et personnel \u00e0 la mat\u00e9rialit\u00e9, notre profonde conception de l\u2019influence de la personne sur la mati\u00e8re. Autrement dit, s\u2019il y a trois personnes sur le projet, il y aura trois approches argument\u00e9es et trois r\u00e9sultats. Cette sensibilit\u00e9 facilite nos \u00e9changes avec les intervenants qui assurent les fabrications et les mises en \u0153uvre.<\/p>\n

Certains artisans au savoir-faire av\u00e9r\u00e9 ont <\/strong>avou\u00e9 red\u00e9couvrir leur potentiel au gr\u00e9 de leur <\/strong>collaboration \u00e0 vos projets<\/strong><\/p>\n

C\u2019est exactement ce niveau d\u2019exigence que nous essayons d\u2019atteindre. Lorsque l\u2019on se balade au mus\u00e9e du Louvre, on constate qu\u2019il existe au monde et dans les diff\u00e9rentes civilisations toutes les id\u00e9es potentielles que les humains peuvent avoir sur les mati\u00e8res et les fonctions. Alors, on se dit que tout est fait et qu\u2019il n\u2019y a plus rien \u00e0 faire. C\u2019est comme les innombrables chansons d\u2019amour qui existent. Et pourtant, tous les jours na\u00eet une nouvelle interpr\u00e9tation\u2026 Patrick a cette capacit\u00e9 aff\u00fbt\u00e9e de savoir recueillir les sensations pour qu\u2019advienne quelque chose de diff\u00e9rent. Lorsqu\u2019il souhaite inventer le futur en d\u00e9passant des limites, il essaye de se positionner entre l\u2019histoire pr\u00e9c\u00e9dente des fabricants et l\u2019actuelle pour comprendre de ce qui a \u00e9t\u00e9 invent\u00e9 dans le temps, toujours habit\u00e9 par cette volont\u00e9 de r\u00e9pondre au projet avec justesse.[\/vc_column_text][\/vc_column][\/vc_row][vc_row][vc_column][vc_btn title=\u00a0\u00bbLIRE LA SUITE\u00a0\u00bb style=\u00a0\u00bbclassic\u00a0\u00bb color=\u00a0\u00bbblack\u00a0\u00bb size=\u00a0\u00bblg\u00a0\u00bb align=\u00a0\u00bbcenter\u00a0\u00bb button_block=\u00a0\u00bbtrue\u00a0\u00bb link=\u00a0\u00bburl:https%3A%2F%2Feshop.boisnewsmedia.com%2Fproduit%2Fmagazine%2Flagenceur-magazine%2Flagenceur-n58%2F|||\u00a0\u00bb][\/vc_column][\/vc_row]<\/p>\n<\/section>","protected":false},"excerpt":{"rendered":"

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